Comment préparer l’aîné à l’arrivée de bébé ?

Publié le : 16/05/2024

Une naissance amène des changements majeurs dans la vie de l’enfant aîné. La psychoéducatrice, autrice et conférencière Stéphanie Deslauriers nous explique comment l’aider à s’adapter.   

Florence Dujoux : Quand parler de la grossesse à son aîné ? 

Stéphanie Deslauriers : Si notre aîné ne pose pas de question, mieux vaut attendre la première échographie, car une femme sur quatre est à risque de faire une fausse couche durant le premier trimestre. Cependant, si la grossesse paraît rapidement et que l’enfant remarque nos changements corporels, mieux vaut privilégier la transparence et répondre à ses questions. Tout dépendra aussi de son âge : on agit différemment avec un tout-petit et un pré-ado ! 

FD : Comment lui annoncer l’arrivée d’un nouveau bébé dans la famille ? 

Comment faire ?SD : Comme parent, dans le cadre d’une grossesse désirée, l’arrivée de bébé est une bonne nouvelle. Mais attention aux projections : ce n’est pas forcément le cas pour notre aîné ! Les parents auraient donc avantage à lui annoncer la naissance à venir comme une « grande » nouvelle plutôt que comme une « bonne » nouvelle, en restant plutôt neutres : « Papa et moi, on a une grande nouvelle à t’annoncer : Maman est enceinte, il va y avoir un nouvel enfant dans notre famille ». Ne pas lui mettre les mots dans la bouche, c’est lui laisser l’espace d’éventuellement exprimer que cela le rend heureux, lui fait peur, lui fait de la peine, ou le met en colère parce qu’il aime bien avoir son papa et sa maman pour lui tout seul. Ensuite, il est important d’observer la réaction de l’enfant, de gérer ses silences, de répondre à ses questions. Ce sera d’autant plus facile que vous aurez bien choisi votre moment pour faire l’annonce, ni lors de la course du matin, ni juste avant le coucher.  

FD : Concrètement, comment préparer l’aîné à la naissance ? 

SD : Pour éviter que notre grand se sente mis de côté, on pourra lui proposer de nous aider à ressortir ou acheter le matériel de puériculture, les vêtements de bébé et les jouets d’éveil, sans le forcer. Pourquoi ne pas lui confier la tâche hautement symbolique de choisir le doudou de son petit frère ou de sa petite sœur ? On peut aussi l’inclure dans la préparation de la chambre, en le laissant choisir entre deux couleurs de peinture par exemple. Autre idée : lui lire des livres mettant en scène des personnages fictifs qui accueillent un petit frère ou une petite sœur, pour lui permettre de s’identifier. Au fur et à mesure que la grossesse évolue, on va essayer de se projeter ensemble dans l’avenir en se demandant « Qu’est-ce-que l’arrivée du bébé va changer? ». Toutefois, il est important de maintenir des moments de connexion avec notre enfant, sans qu’il soit tout le temps dans le rôle du futur grand frère ou de la future grande sœur. Ce sera d’ailleurs aussi le cas après la naissance.  

FD : Quelles peuvent être ses réactions quand bébé pointe le bout de son nez ? 

SD : Les comportements régressifs (reprise de la tétine ou du pouce, énurésie nocturne) sont normaux. On ne veut pas culpabiliser l’enfant. Son corps envoie des messages que son cerveau en plein développement n’est pas encore capable d’exprimer. C’est à nous de voir ses comportements comme la pointe de l’iceberg et d’aller essayer de comprendre quels sont les besoins sous-jacents. D’ailleurs, un mot sur la régression : la progression n’est jamais linéaire, quand on parle de régression, c’est parfois juste un petit creux de vague, transitoire et passager. Plus on l’accueille en sachant que l’on va remonter la pente, généralement plus vite cela arrive parce qu’on ne met pas tout le focus là-dessus. 

FD : Quand consulter ? 

SD : Quand on voit que les difficultés d’adaptation se prolongent dans le temps et commencent à générer des impacts négatifs dans l’ensemble des sphères de la vie. Par exemple, cela fait quatre mois que notre aîné tape le bébé, qu’il refuse de le regarder, de le toucher, de lui donner le biberon et il commence à avoir des comportements difficiles à la crèche ou à l’école. D’ailleurs, il est important de rester en communication avec le milieu de garde ou le milieu scolaire en les informant de la grossesse et de la naissance : on invite éducatrices et enseignantes à nous faire signe si notre aîné rencontre des difficultés, pour intervenir rapidement, et éviter de se rendre à un point où l’adaptation est compromise et où il faut consulter.  

« Dans la parentalité, il n’y a pas de réponse universelle : même si les parents appliquent à la lettre toutes les meilleures recommandations pour préparer l’aîné à l’arrivée de bébé, il peut avoir une réaction qui n’était pas prévisible. Le comportement de notre enfant n’est pas le miroir de notre compétence parentale : il a sa personnalité acquise, son tempérament inné, et les gros changements engendrent parfois de grosses réactions. Rappelons-nous en pour ne pas nous culpabiliser comme parents ! »  

Stéphanie Deslauriers (https://stephaniedeslauriers.com/) 

Quelques suggestions de lecture :  

L’entrevue a été éditée pour des fins de concision.  

Rédaction : Florence DUJOUX, journaliste indépendante pour Les Parents Zens

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