Publié le : 07/03/2022
Les enfants sont encouragés à adopter des comportements socialement sexués, nuisant à l’atteinte de leur plein potentiel. Et si on les poussait plutôt à développer leurs goûts et leurs talents ?
S’il est indéniable que les filles et les garçons sont biologiquement différents, on voit mal comment ces différences physiologiques pourraient conduire les fillettes à préférer le rose et les jeunes garçons à se passionner pour les petites voitures.
Pourtant, dès leur plus jeune âge, les enfants baignent dans un environnement sexiste, du choix des vêtements à celui des activités, de l’école à la visite chez les grands-parents, des émissions de télévision aux réseaux sociaux.
Les parents eux-mêmes ne sont pas exempts de stéréotypes, plus ou moins conscients. S’ils sont peu enclins à autoriser leur fils à porter une robe de princesse, c’est parce que l’idée que leur enfant ait une identité sortant des normes fait peur, estime la psychologue Dre Nadia Gagnier.
Le problème avec les stéréotypes de genre
Rappelons qu’un stéréotype est une caractéristique attribuée à des individus, selon leur appartenance à un groupe. Dans le cas des stéréotypes de genre, on présume par exemple que « toutes les filles sont des littéraires » alors que « tous les garçons sont des scientifiques » : on effectue des généralisations, en oubliant que les filles sont différentes les unes des autres, de même que les garçons.
« Le problème du genre, c’est qu’il nous dicte ce que nous devons être en tant que fille ou garçon. Alors qu’il faudrait prendre en compte ce que nous sommes vraiment, en tant que personne », lit-on dans Nous sommes tous des féministes, le célèbre manifeste de Chimamanda Ngozi Adichie adapté pour la jeunesse.
Les stéréotypes de genre nuisent à tous, filles et garçons. Par exemple, le recensement des études scientifiques portant sur les stéréotypes de genre en milieu scolaire a montré qu’ils influencent négativement l’orientation des filles dans les filières scientifiques et la persévérance scolaire des garçons.
Des stratégies pour les atténuer
« Limiter les stéréotypes de genre à la maison, c’est donner à l’enfant la liberté d’être qui il est vraiment, et s’assurer qu’il ne va pas inhiber des parties de lui-même par ce qu’il sent que ce ne sera pas accepté par ses parents », affirme Dre Nadia Gagnier.
Comment favoriser la capacité d’un enfant à faire des choix selon qui il est, plutôt que pour se conformer aux stéréotypes de genre ? La psychologue nous partage ses conseils :
Prendre conscience de ses propres biais inconscients : les parents devraient d’abord se demander comment ils ont été eux-mêmes impactés par les stéréotypes de genre, et comment ils se positionnent par rapport à eux.
Varier les jouets, les livres et les activités : dès le plus jeune âge, on veillera par exemple à lire des histoires dont le personnage principal est une fille à un garçon, et à proposer des jouets davantage associés à la masculinité à une fille. Et inversement !
Exposer les jeunes à des modèles diversifiés : « L’idée n’est pas forcément de chercher à exclure tout stéréotype de la maison, mais plutôt de s’assurer que notre enfant voit des modèles qui sortent de ces normes-là », recommande la psychologue.
Développer la réflexion des plus grands : plutôt que de leur apporter des réponses, il s’agit de les amener à se poser des questions, comme « si tu avais un intérêt qui ne correspondait pas à ton genre, que ferais-tu ? ».
Laisser les enfants explorer différentes identités : votre fille veut jouer au rugby, votre garçon souhaite faire du patinage artistique : ne le forcez pas à renoncer, ce serait le brimer. Peut-être va-t-il réaliser que ce n’est pas pour lui, ou au contraire se découvrir de nouvelles aptitudes !
Soutenir les jeunes qui font des choix hors normes : les laisser faire des choix atypiques ne suffit pas à leur épanouissement, il vous faudra aussi les outiller pour faire face aux critiques, voire à la discrimination.
Ne jamais forcer un enfant à devenir un porte-parole des gens qui font un choix non conventionnel : il a le droit de changer d’idée ! Et s’il a abandonné une activité qui lui convenait à cause des stéréotypes, il pourra toujours y revenir plus tard, lorsque son identité sera plus affirmée.
« Il n’est jamais trop tard pour se demander ce qui est le mieux pour son enfant », conclut-elle.
Rédaction : Florence Dujoux